Tout élément d’addition augmente le risque de trempe d’un acier, donc diminue sa soudabilité. On évalue ce risque par rapport aux teneurs de chaque élément d’addition.
3 cas de figure sont à identifier :
- les aciers non alliés (AN) : pour eux, seul le carbone et le manganèse impactent la trempabilité puisque, par convention, tous les autres éléments sont en présence minime. On utilisera donc une formule simplifiée la plupart du temps.
- les aciers faiblement alliés (AfA) : les éléments d’addition sont en quantité plus ou moins importante, ayant un réel impact sur la trempabilité. On utilisera donc la formule la plus connue qui prend en compte tous ces éléments.
- les aciers fortement alliés (AFA) : certains éléments d’addition sont en quantité si importante que la formule “perd les pédales”. On utilisera donc le diagramme de Schaeffler.
La dernière partie de cet article traite de ce qu’on peut faire une fois connu le Ceq de notre matériau.
Les aciers non alliés (ANA)
La formule à utiliser pour les ANA est en réalité un morceau de la formule complète de l’IIS qui ne reprend que le C et Mn :
Ceq = C + Mn/6
A noter que, même si le monde de la métallurgie utilise cette formule pour les ANA, elle n’est malgré tout pas entièrement représentative de la trempabilité de ces matériaux. Mais par convention, on se base sur elle.
On reparle de cette formule avec les aciers AfA.
Les aciers faiblement alliés (AfA)
Pour les AfA, on utilisera la plupart du temps la formule complète du Ceq de l’IIS (ou IIW en anglais). A noter qu’il en existe d’autres qui changent la pondération des éléments, tout en donnant des résultats du même ordre (si vous vous ennuyez pendant un congrès de métallurgistes, prenez l’une de ces autres formules et lancez à voix haute “celle-ci est quand même la formule la plus juste”, puis écartez-vous, prenez une coupe de champagne et profitez du spectacle).
Il se calcule sur les teneurs réelles des éléments (pour un AfA de type 10Cr9, il y aura donc 0,1% de C et 2,25% de Cr).
Cette formule sous-entend qu’à teneurs égales, le Carbone est six fois plus trempant que le Manganèse (0,6% de Manganèse sont nécessaire pour obtenir la même trempabilité qu’avec 0,1% de Carbone).
Les aciers fortement alliés (AFA)
Comme vous le savez probablement, les éléments d’addition ont un pouvoir soit alphagène, soit gammagène. En quantités importante, ils ont une telle influence sur la composition du matériau que ce dernier ne réagit plus selon les règles classiques.
Un acier inoxydable austénitique par exemple ne trempera jamais (pas de formation de martensite) alors que la formule classique du Ceq le donne comme extrêmement trempant.
Pour évaluer la trempabilité d’un AFA, on utilisera donc le diagramme de Schaeffler (ou ses dérivés) et les formules de Chrome équivalent et Nickel équivalent associées. C’est en positionnant le matériau sur le diagramme qu’on déterminera sa trempabilité et, plus généralement, son comportement. Cette approche est valable pour tous les AFA, inox ou non.
Pourquoi le Ceq ne fonctionne plus pour les AFA ?
Pour qu’un matériau trempe, il faut réunir plusieurs conditions : un refroidissement rapide et, surtout, une composition chimique entraînant un diagramme d’équilibre où une phase austénitique se trouve au-dessus d’une phase ferritique. Le refroidissement rapide passera de la première à la seconde et, si l’un de ces facteurs manque, pas de trempe quelque soit la vitesse de refroidissement.
En pratique, tous les éléments d’addition rendent le matériau plus trempant mais :
- Dans le cas de l’inox Austénitique, la phase Ferritique a disparu (ou, du moins, a été repoussée sous le seuil de “martensite start”).
- Dans le cas de le l’inox Ferritique, la phase Austénitique a disparu. La phase Ferritique occupe tout l’espace.
Dans ces deux cas, il ne peut y avoir de trempe car la transformation allotropique Austénite → Ferrite ne peut être effectuée.
Enfin, un AFA non inoxydable (par exemple un acier à 9% de Chrome ou un acier à Ni > 5%) sera à positionner sur le diagramme pour déterminer son comportement.
Carbone équivalent et Risque de trempe
Au-delà de la modification de la composition chimique, et donc du diagramme d’équilibre du matériau, les éléments d’addition agissent schématiquement sur le diagramme TRC : ils le déplacent vers la gauche (moins trempant) ou vers la droite (plus trempant).
On considère le risque de trempe ainsi (notamment vis-à-vis de la FAF ou Fissuration à Froid) :
Tranquille < 0,35% ≤ Précautions < 0,45% ≤ Mesures indispensables < 0,70% ≤ Toutes mesures
- > 0,45% : préchauffage au minimum, soin particulier à diminuer l’hydrogène environnant.
- > 0,70% : préchauffage, électrodes spéciales, traitements thermiques…
Il faut ajuster le risque réel selon la géométrie : épaisseur, type d’assemblage et position. Ces facteurs géométriques peuvent favoriser la trempe et faire réévaluer à la hausse ou à la baisse le risque. Ainsi une soudure à plat sur fine épaisseur (double facteur limitant les voies de dispersion de la chaleur) peut faire considérer un acier à Ceq=0,40% comme non trempant. Au contraire, le soudage d’un angle intérieur en T sur de fortes épaisseurs (très forte dispersion de la chaleur, accélérant le refroidissement) peut faire considérer un acier à Ceq=0,40% comme nécessitant des mesures indispensables. C’est aussi le cas pour une soudure plafond.
On déduit qu’un acier à au moins 0,45% de Carbone présente en soi un risque de trempe, sans avoir besoin de calculer l’impact des autres éléments.
De même le Manganèse est souvent présent dans les aciers faiblement alliés, alors que les autres éléments y sont peu présents. Ainsi la formule simplifiée suffit dans la plupart des cas pour évaluer la soudabilité (un acier à 0,43% en formule simplifiée sera très probablement au-delà de 0,45% une fois tous les autres éléments pris en compte).
Carbone équivalent et soudabilité
Le calcul du carbone équivalent permet notamment d’évaluer le risque de Fissuration à Froid dont l’un des facteurs est la trempabilité de l’acier soudé : plus il est élevé, plus le risque est grand.
Pour éviter la trempe, vous pouvez étudier les mesures de prévention de la FAF. Pour résumer : préchauffer, souder chaud, assurer une température minimale entre passes, réaliser un traitement thermique de détente après soudage… Tout pour augmenter le tr800-500 (voir la fiche des symboles pour ce terme).
Autre approche, on peut recourir au beurrage des faces du chanfrein (1 à 2 passes) avant de les joindre par soudage. En effet, un cordon de surfaçage occasionne bien moins de contraintes. De plus, l’opération de soudage peut effectuer une régénération de la ZAT affectée par le beurrage, et ainsi retrouver des CM acceptables. Enfin, la dilution lors du soudage se fera avec les face beurrées constituées du même matériau (le métal d’apport). La zone où se situeront les contraintes sera donc mieux maîtrisée et plus homogène, donc moins sensibles aux fissures.
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